Hommage à Ibrahima Dieng : "Mooooooooonsieur" le Directeur, tu étais juste le meilleur ( Par Abdoulaye CISSÉ)
samedi 14 juin 2025 • 773 lectures • 1 commentaires
Société
22 heures
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Entre souvenirs personnels, anecdotes touchantes et vérités professionnelles, cet hommage vibrant retrace l’empreinte indélébile laissée par Ibrahima Dieng, Directeur commercial du Groupe Futurs Médias. Un texte de cœur pour saluer un homme d’exception.
J'aurais pu, il est vrai, un peu comme tout le monde, placarder la photo du fringuant Ibrahima Dieng pour saluer la mémoire de mon défunt collègue, ci-devant Directeur commercial du Groupe Futurs Médias (GFM).
Une photo de Dieng, ça ne raconterait pas mon histoire particulière avec celui que j'appelais “Mooooooonsieur le Directeur”.
Et pourtant, mon histoire avec Ibrahima Dieng commence sur un gag…
À l'hiver 2004, le 11 novembre exactement, jour commémorant comme chaque année “l'armistice” mettant fin à la Première Guerre mondiale 14/18, coïncidant en cette année 2004 avec la mort de Yasser Arafat à l'hôpital militaire Percy de Clamart en France, j'avais rendez-vous le soir en région parisienne avec Ibrahima Dieng.
Lui travaillait déjà pour l'artiste Youssou Ndour et résidait en France… J'étais pour ma part salarié de GFM (à l'époque de RFM seulement – la télévision TFM n'était pas encore née), en disponibilité et fraîchement arrivé en France pour mes études.
Dieng était chargé de me remettre des équipements de correspondant radio (ordinateur et enregistreur) qui me seront installés par Séguy Niang, un autre “élément” de Youssou en France. Et Marie Ndour, la sœur de Youssou, était aussi dans la boucle.
J'avais couvert et fait vivre à l'antenne de la radio RFM, les 10 jours d'hospitalisation de Arafat en France jusqu'à sa mort, avec les moyens du bord comme on dit.
Ibrahima Dieng découvrait avec “émerveillement” le travail de correspondant de presse. Je le vois encore me conter non sans fierté comment j'ai pu lui faire vivre cet événement comme s'il y était.
Un événement avec un écho planétaire.
Dieng était enthousiaste à me remettre les équipements demandés par notre patron.
Il m'a donné rendez-vous à “Neuilly” (tout court).
J'ai pris mes dispositions pour être en avance au point de rendez-vous. Je l'attendais tranquillement sur les quais du RER C à Neuilly - Porte Maillot (à la lisière du 17e et des Hauts-de-Seine), lui m'attendait à sa gare de Neuilly Plaisance en Seine-Saint-Denis.
Le rendez-vous ne s'est jamais fait ce jour-là.
On s'est longtemps charriés sur ce gag mais je le confesse, c'était moi le bleu.
Il était en France depuis plus longtemps que moi et maîtrisait certainement mieux le code du langage des Franciliens.
Je n'ai jamais coupé avec ma maison GFM pendant mes 16 ans de présence en France.
Ibrahima Dieng était rentré au Sénégal depuis bien longtemps et a conduit en tant que Directeur commercial la création des différents supports qui ont consolidé le statut de GFM en tant que groupe de presse leader.
Nos retrouvailles étaient toujours des retrouvailles de “Parisiens”.
Dieng était un dandy, un chic type, un titi parisien dans ce que le titi a de plus sympa.
Aux Almadies, siège du groupe, c'est dans son bureau qu'on servait le meilleur café de la maison, comme je l'aime.
J'espère que Pathé Ndoye Ba, Diouldé ou Maguy, qui ont les 2e, 3e et 4e meilleurs cafés de la maison, ne liront pas ces lignes pour me tenir rigueur de ce palmarès et me refuser mes prochaines doses.
J'aimais mes moments avec Dieng et il en avait du temps pour moi.
Et c'est quelqu'un qui avait compris l'enjeu d'une affirmation de l'éditorial pour tirer le commercial. Enjeu essentiel pour la pérennisation de l'entreprise de presse.
Nous avons été sonnés, secoués par l'annonce de la mort de Dieng.
Au-delà de la relation humaine, on se dit : Dieu, pourquoi lui, pourquoi maintenant alors que c'est celui dont on a le plus besoin dans la maison GFM, par ces temps d'incertitudes en raison des difficultés financières de l'entreprise (ce n'est plus un secret).
Au moins tout autant que Youssou Ndour pour son entregent, c’est Ibrahima Dieng qui colmatait les brèches avec le fruit des OI (Ordres d’insertion) de ses équipes pour payer les salaires.
Nous savons ce que nous, salariés du groupe GFM, devons à Ibou Dieng.
Il n'y a qu'à voir comment ses partenaires commerciaux cherchaient de ses nouvelles les 2–3 derniers jours de sa vie où il est resté injoignable.
Ces gros portefeuilles d'affaires sont plus que de simples relations commerciales avec Dieng.
Dieng était un as de la relation clientèle, des relations humaines tout simplement.
Rares sont les clients qui pouvaient le quitter après avoir travaillé avec lui, au grand bonheur des comptes de la maison.
Il a été en mission jusqu'au bout. Recouvrer partout, jusqu'à “tomber debout”.
Beaucoup ont appris sa mort avant de le savoir “malade”.
Quand l'imam qui a dirigé la prière mortuaire demande dans un rituel “si Dieng doit de l'argent à quelqu’un, de se rapprocher de la famille”, je me suis imaginé fendre les rangs pour lui dire : “Imam, Dieng a payé toutes ses dettes. Jusqu’aux dettes des salaires.”
Ce mois de mai mourant était certainement le mois le plus difficile et le plus stressant (pour cause de Tabaski). Jusqu'à la fin mai, les “paras” du mois d’avril n’étaient pas tombés mais il fallait compter avec Ibrahima Dieng.
Il a gratté partout, imaginé tous les recouvrements et certainement fait des recouvrements auprès de fidèles clients sur des engagements non encore exécutés.
Ses relations de confiance lui permettaient de telle gymnastique.
À nous d’honorer sa mémoire en exécutant tous ses engagements, y compris ceux qu’il nous laisse en héritage. Et pour sûr, nous serons débiteurs dans notre balance avec Ibrahima Dieng.
Dieu, qu’il a porté le groupe !
Aux premières heures de l’annonce du décès d’Ibrahima Dieng, j’ai cherché refuge auprès de mon groupie dont le défunt lui-même me savait proche.
J’ai entendu au bout du fil les soupirs et sanglots de Thérèse,
J’ai senti la voix étouffée d’émotion de Diouldé,
Ngallisch, au tempérament de roc, est restée stoïque.
Quand j’ai appelé Ngallisch, elle se dirigeait déjà chez celle que je n’ai pas osé appeler.
Et pour la première fois, j’ai senti “Badiane” Oumy Ndiaye Ba perdre pied. Et ça, pour qui connaît la dame, c’est terrible.
Qu’est-ce que je pouvais dire à cet instant à Marie Bonbon, à Marie Godjo, à Marie Gueye, à Marie Dieng.
C’était mes appellations de Marie, selon les circonstances et selon mes humeurs.
Et depuis que Ibrahima Dieng est parti, jeudi matin (il y a une semaine déjà, jour pour jour), je prie, et je cherche les moyens, pour rester fort pour pouvoir soutenir mon amie Marie.
Mes meilleurs moments avec Marie, faits de joyeuses chamailleries, me paraissent si lointains.
Dans le confort sommaire du bureau de Marie Dieng, on se défiait les yeux dans les yeux. Et à ce jeu, je le confesse, elle gagnait toujours. Je baissais la garde dans une tranche de franche rigolade.
Sacrée Marie au caractère de bonhomme !
C’est tout ça qui me manque aujourd’hui. Voir ma Marie et ne pas pouvoir soutenir son regard est un supplice pour moi.
J’ai triché pour voler un regard fixe sur Marie, et j’ai vu ses yeux embués de larmes. J’ai définitivement baissé la garde : c’est au-dessus de mes moyens.
J’ai visité la veuve Marie, j’ai fui son regard, comme un lâche.
Je sais qu’elle sait que j’ai esquivé à plusieurs reprises pour ne pas croiser son regard. J’ai surpris comme un sourire en coin, comme pour me narguer et me challenger dans un dernier chahut : “Montre que tu es un bonhomme…”
Désolé Marie, je rends les armes. C’est encore très au-dessus de mes moyens.
J’ai cherché refuge dans les mots doux de proches et amis qui me rapportent que Marie tient le coup.
Ils disent que Marie est courageuse.
Je n’y crois pas, mais ça m’arrange d’entendre tout ça. Moi aussi, je me donne bonne conscience comme je peux.
Ils disent aussi que Marie a la chance d’être entourée, protégée et accompagnée par sa maman, une maman aimante et stoïque. Mais ça, on le savait et cette épreuve ne fait que renforcer ce lien mère-fille.
Merci maman d’être cette boussole de foi qui porte et guide Marie.
Mon autre lien avec Marie, c’est son parrain, mon tonton par alliance, Tonton Magaye.
Tonton Magaye est parrain de Marie. Je me suis une fois retrouvé chez Tonton Magaye, moi-même en “parrain” (ou représentant) pour demander la main d’une autre nièce de Tonton Magaye pour un ami.
Marie et moi, on se disputait Tonton Magaye.
On aimait mettre Tonton Magaye dans l’embarras en lui racontant nos “joyeuses disputes” et espérer son parti pris pour l’un contre l’autre.
Tonton Magaye, un équilibriste, depuis son Rao de retraite, n’a jamais choisi et il espérait nous réunir à un de ses séjours à Dakar.
Quand le défunt Ibrahima Dieng surprenait nos joyeusetés entre Marie et moi, il s’effaçait et on pouvait l’entendre s’éloigner et dire à haute voix, comme s’il cherchait un témoin à sa prophétie : “Séén xarito bii, gueumoumako: yénn niaara yémm.”
Évidemment, je pouvais m’honorer qu’il m’attribue le même tempérament et caractère qui sont ceux de celle qu’il s’est choisie pour partager sa vie.
Ibou et Marie faisaient beau à voir ensemble.
Non plutôt, c’était beau de les savoir ou de les imaginer ensemble.
Car rares sont ceux qui peuvent attester les avoir vus ensemble sur le lieu de travail.
Même s’ils sont deux conjoints salariés du même groupe, Ibou Dieng, pour sa part cadre dirigeant de l’entreprise, s’imposait une discipline, une règle, qui cloisonnait bien les choses. Et Marie n’était pas non plus une “lover” au bureau.
Marie, je la savais d’une foi profonde en Allah. Mes présences furtives et à l’improviste dans son bureau (quand elle était là) n’ont jamais pu la distraire de ses invocations avec son compteur numérique de wird.
Ça m’énervait qu’elle feignait de ne pas sentir ma présence et ça finissait en une joyeuse chamaillerie entre elle et moi.
Il arrivait que son Ibrahima Dieng soit témoin de tout ça.
Ça l’amusait mais il ne se mêlait jamais.
J’en oublie presque que mon laïus est un hommage à Ibrahima Dieng, si brusquement arraché à notre affection.
Et je m’imagine déjà combien de fois nous serons confrontés à des situations où nous nous dirons : “Si Dieng était là…”
C’est pour cela aussi que nous ne l’oublierons jamais.
Vis bien dans l’au-delà, Mooooooooonsieur le Directeur et pardonnes-nous quand nous serons défaillants, pas à la hauteur, pas dignes de ton rang.
Tu étais juste le meilleur ici.
Par Abdoulaye CISSÉ - Journaliste GFM
Publié par
Joe N. Marone
editor
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