« L’élevage ne peut plus être ignoré dans l’action climatique », avertissent les experts ouest-africains à Bonn

vendredi 25 juillet 2025 • 161 lectures • 0 commentaires

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« L’élevage ne peut plus être ignoré dans l’action climatique », avertissent les experts ouest-africains à Bonn

iGFM - (Dakar) À l’occasion de la Conférence climat de Bonn, un panel d’experts, de négociateurs africains, de représentants gouvernementaux et de chercheurs a appelé à intégrer pleinement l’élevage dans les politiques climatiques, notamment en Afrique de l’Ouest et au Sahel. 

Ce plaidoyer intervient dans un contexte de pressions croissantes sur les systèmes pastoraux, confrontés à la fois aux effets du changement climatique, à l’insécurité et à la dégradation des ressources naturelles.


Réunis lors d’un dialogue parallèle à la 62e session du SBSTA (Organe subsidiaire de conseil scientifique et technologique de la CCNUCC), les participants ont souligné que les systèmes d’élevage durables peuvent jouer un rôle essentiel dans la lutte contre les effets du changement climatique, tout en contribuant à la stabilité, à la sécurité alimentaire et à la résilience des communautés rurales.


Le Sénégal pour montrer la voie Le Sénégal, engagé depuis plusieurs années dans les négociations climatiques, a été à l’avant-garde de cette rencontre. Lamine Diatta, négociateur climat au ministère de l’Environnement, du développement durable et de la transition écologique, a martelé que « l’agenda climatique pour l’agriculture en Afrique de l’Ouest doit impérativement inclure l’élevage. L’élevage et les forêts sont interconnectés dans notre région.


Les systèmes pastoraux bien gérés, combinés à l’agroforesterie, participent au maintien des écosystèmes et à la recharge des nappes phréatiques. ». Selon lui, il est temps de reconnaître que les éleveurs et agro-pasteurs ne sont pas des passagers clandestins de la transition climatique, mais bien des acteurs clés, pour peu qu’ils soient accompagnés et valorisés dans les politiques publiques.


L’ILRI et ses partenaires d’Afrique ouvrent une nouvelle voie L'événement a été coorganisé par l’Institut International de Recherche sur l’Élevage (ILRI), le Bureau interafricain des ressources animales de l’Union africaine (AU-IBAR), la GIZ (coopération allemande) et le WWF. Plus de 30 experts venus de l’Afrique de l’Ouest, de Madagascar et d’Europe y ont pris part, y compris des bailleurs, des chercheurs, des ONG et des responsables gouvernementaux.


Abdrahmane Wane, représentant régional de l’ILRI pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, a alerté: « Les risques climatiques sont majeurs : 60 % des pasteurs pourraient perdre leurs moyens de subsistance si aucune action n’est prise. » Il a présenté le “Livestock and Climate Solutions Hub”, une plateforme lancée par ILRI pour fédérer les efforts en faveur d’un élevage Cheikh Mbow, Directeur du Centre de Suivi Écologique (CSE) basé à Dakar, a salué la création du hub de l’ILRI comme un pont essentiel entre les chercheurs et les décideurs. « Il existe un fossé entre les questions que posent les investisseurs et les politiques, et la manière dont les données scientifiques sont générées et transmises. Ce hub peut aider à mieux aligner les besoins et les réponses. »


Patrick Karani, de l’AU-IBAR, a annoncé que son institution travaille à l’élaboration d’une position africaine commune pour faire de l’élevage un pilier de la gouvernance climatique du continent. Il a souligné que l’Afrique doit parler d’une seule voix pour intégrer l’élevage dans les canaux de financement et de décision climatique. Halima Bawa Bwari, négociatrice climat du Nigeria, a insisté sur le rôle de la réduction des émissions de méthane, notamment en mobilisant les jeunes comme « scientifiques citoyens » pour collecter des données fiables.


Des solutions concrètes et une feuille de route Plusieurs intervenants ont souligné l’inadéquation actuelle du financement climatique. Jan Brix, haut responsable du ministère allemand du Développement (BMZ), a rappelé que moins de 4 % des financements climat mondiaux vont à l’agriculture et à l’alimentation, et qu’une infime partie de cette somme concerne l’élevage. « Le coût de l’inaction dépasse largement celui de l’investissement.


Il est temps de bâtir une coalition d’acteurs autour d’une vision partagée pour transformer l’élevage de manière durable et inclusive. » Le dialogue a permis de dégager une feuille de route ambitieuse autour de six axes prioritaires : 1. Des solutions climatiques intégrées, mêlant santé animale, génétique, nutrition et outils numériques, afin de renforcer la résilience des systèmes d’élevage tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. 2. Le développement des chaînes de valeur pastorale comme levier de stabilité économique et sociale, dans une région marquée par la fragilité et les tensions. 3. La restauration des pâturages et la conservation de la biodiversité, en s’appuyant sur les savoirs et pratiques des pasteurs. 4. Une coopération transfrontalière renforcée, essentielle pour sécuriser la mobilité du bétail, harmoniser les politiques d’adaptation et prévenir les conflits. 5. L’inclusion des jeunes et des femmes, les deux groupes les plus dynamiques mais aussi les plus vulnérables, en leur ouvrant des opportunités via les services numériques, la transformation des produits et la valorisation locale. 6.


Un engagement renforcé science-politique, pour fournir aux décideurs des données locales, ventilées et exploitables, notamment dans le cadre du suivi, de la notification et de la vérification (MRV) des engagements climatiques. Et maintenant ? Les experts réunis à Bonn s’accordent : il faut aller au-delà des déclarations et structurer des plateformes de financement et de mise en œuvre.


Parmi les prochaines étapes, le développement d’un tableau de bord des solutions d’élevage climato-intelligentes, qui servira de référence pour les bailleurs, les décideurs et les praticiens. L’ILRI, avec ses partenaires au Sénégal comme la Direction de l’Élevage, l’ANACIM, l’ANCAR, l’ISRA, le RESOPP ou encore l’ADID, poursuivra ses efforts pour démontrer que l’élevage fait partie de la solution, pas du problème.

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Publié par

Harouna Fall

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