Tchad: l’ancien Premier ministre Succès Masra interpellé à son domicile pour «incitation à la haine»

vendredi 16 mai 2025 • 520 lectures • 2 commentaires

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Tchad: l’ancien Premier ministre Succès Masra interpellé à son domicile pour «incitation à la haine»

Au Tchad, l’ancien Premier ministre Succès Masra a été interpellé ce vendredi 16 mai à l’aube, à son domicile, ont annoncé ses proches à RFI. Si aucun motif n'avait été communiqué lors de son arrestation, le procureur de la République a ensuite accusé l'opposant d'« incitation à la haine ».

Le domicile de Succès Masra, président du parti d’opposition les Transformateurs, situé dans le quartier Gassi du VIIe arrondissement de Ndjamena a été investi ce vendredi 16 mai par des hommes armés. Des membres des corps de défense et de sécurité, ceux-ci l’ont amené vers une destination encore inconnue, annoncent à RFI ses lieutenants.

Les membres de son parti ajoutent que le motif de son enlèvement n’a pas été communiqué à ceux qui étaient présents sur place. Le parti les Transformateurs exige la « libération immédiate et sans condition » de son président.

Quelques heures plus tard, le procureur de la République Oumar Kedelaye a tenu un point presse. Selon lui, l’enquête se poursuit, mais Succès Masra aurait, via ses réseaux sociaux, lancé des appels à la haine et à la violence. Il est désormais poursuivi pour « complicité d'assassinat », « incendies volontaires » et « profanation de sépultures », rapporte notre correspondante à Ndjamena, Nadia Ben Mahfoudh.

Le parquet explique que ces messages auraient un lien avec l’attaque survenue mercredi dans le village de Mandakao, dans la région du Logone-Occidental (sud-ouest du pays). Une attaque meurtrière dont le bilan s’élève à 42 morts, principalement des femmes et des enfants.

Selon le procureur, « les enquêtes menées par la police judiciaire ont révélé l'implication de M. Assyongar Masra Succès ». « Des messages ont été diffusés, notamment sur les réseaux sociaux, appelant la population à s'armer contre d'autres citoyens », a-t-il précisé, sans révéler leur contenu ou si M. Masra en était l'auteur.

En revanche, le procureur de la République ne précise pas, lui non plus, le lieu de détention de l'ancien Premier ministre.

Les portes ont été forcées

C'est à 5h56 du matin locales, précisément, selon le parti les Transformateurs, que ces hommes en uniforme se sont présentés au domicile du chef du parti. Les gardiens n'ont eu d'autres choix que de les laisser entrer.

Ils ont ensuite forcé les portes de la maison et emmené Succès Masra, comme le montre une vidéo de surveillance de la cour diffusée par le parti. Succès Masra était seul chez lui.

« En aucun cas, il aurait appelé à la haine ou à des confrontations communautaires », s'indigne son parti



Une délégation du parti les Transformateurs a pu rencontrer Succès Masra avec ses avocats. Selon Djesada Ndolembaye,  qui en faisait partie, Succès Masra « était bien surpris des chefs d’accusation portés contre lui, et ce sont ses avocats que lui ont appris. Il n’avait aucune idée pourquoi il avait été arrêté. »

Selon un des vice-présidents du parti de Succès Masra, le motif de son arrestation «l’a surpris, puisque Succès Masra a adressé les condoléances aux familles des victimes»

François Mazet

Ndigngar Djeguelmbaye, conseiller à la stratégie du parti, estime que les accusations sont sans fondements, et appelle les militants et la population à demeurer calmes : « Ces événements viennent de se passer et l'équipe déléguée par le gouvernement est encore sur les lieux. En tout cas, aucun résultat des enquêtes n'a été donné. Du coup, on est quand même stupéfaits et étonnés de voir qu'on est parvenus à la conclusion des enquêtes et déjà indexer notre président, s'indigne-t-il auprès de notre journaliste au service Afrique, François Mazet. Les militants sont choqués, je comprends leur douleur, nous comprenons leur douleur. On reste mobilisés et sereins parce que nous savons que notre président est un homme de dialogue et nombre de paix, donc en aucun cas, nous n’allons accepter que ces éléments avancés contre lui soient vrais. Donc en aucun cas, il aurait appelé à la haine ou à des confrontations communautaires. »

Critiques ouvertes au pouvoir

Le 29 avril 2025, il avait bien critiqué le président Mahamat Idriss Déby Itno, estimant qu'il ne respectait plus l'esprit de l'accord de Kinshasa signé assurant la transition. Il lui a alors demandé de « changer de cap pour que le changement voulu par le peuple devienne réalité », dénonçant également « des changements cosmétiques » du président, ainsi qu'un maintien du statu quo par « des forces d’influence nuisibles ». Les proches du président avaient dénoncé des « propos outranciers ».

Il est pour l'instant impossible à savoir si son arrestation de vendredi 16 mai ont un rapport quelconque avec ses dernières critiques.

Après un exil d'un an et demi, le chef du parti les Transformateurs avait pourtant été nommé Premier ministre par le président Mahamat Idriss Déby Itno en janvier 2024. Il avait quitté la primature quelques mois plus tard, alternant entre critiques au pouvoir et appels à travailler ensemble.

RFI


 

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Publié par

Mamadou Salif

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